samedi 9 janvier 2010
La mort du roi Tsongor de Laurent Gaudé
23h30, une bonne heure pour dire du mal. Ça m’arrive de dire beaucoup de bien d’un livre ou d’un auteur. C’est comme ça. Fabriqué avec option « passion ». Mais je peux tout aussi bien dire du mal quand je ne suis pas d’accord avec l’odeur d’encens ambiante savamment distillée depuis quelque café littéraire germanopratin. Ce soir, c’est le cas. On avait cru gentil de m’offrir un roman. Le titre lourd d’épopées, la critique envoûtée. Un cadeau. On peut ne pas aimer le cadeau. Et le dire. J’ai vécu quelque temps en Afrique et je m’y suis senti heureux. J’ai aimé la littérature jaillie des indépendances. Pour le premier roman, j’étais remarquablement tombé sur Le devoir de violence de Yambo Ouologuem. Évidemment, ça met la barre un peu haut. Mais c’est un livre qu’on relit. Plusieurs fois. Si vous avez un cadeau à faire à quelqu’un qui aime –et surtout comprend un petit peu l’Afrique- offrez-lui ce roman de Ouologuem. Et maintenant, allons-y…
La mort du roi Tsongor de Laurent Gaudé Actes sud 2002 (prix Goncourt des lycéens 2002)
Voilà un beau roman, bien propre, écrit dans une langue confite pour faire un peu croire que c’est celle d’un écrivain africain traduite par un auteur blanc compatissant. « Au cœur d’une Afrique ancestrale, le vieux roi Tsongor, roi de Massaba, souverain d’un empire immense, s’apprête à marier sa fille… » voici le début-cliché de la quatrième de couverture et tout, ou presque, est déjà dit.
Il faut aujourd’hui aller glaner dans une Afrique fantasmée, inventée de toutes pièces, rêvée par des blancs qui semblent bien n’avoir guère voyagé, pour écrire des romans à l’apparence profonde mais à la réalité creuse. Cette superficialité clinquante a toutes les chances de plaire à un public jeune et sans aucune autre culture que télévisuelle. D’où ce prix Goncourt des lycéens qui ressemble plus à un camouflet qu’à une cerise sur le gâteau.
Il s’agit en fait d’un roman initiatique, une histoire cent fois rebattue, celle du fils prodigue. Souba, échappant par miracle à la tuerie qui s’annonce, va construire pour son père qui vient de mourir, sept mausolées dans des endroits différents du royaume que son père s’est taillé en massacrant des populations entières, ce qui est bien le métier de conquérant.
La guerre éclate à cause d’une femme, Samilia, la fille de Tsongor lui-même… elle a été promise à deux hommes à la fois. Ces deux meneurs vont faire s’entretuer des milliers d’hommes sous les murailles de Massaba sans parvenir à se départager… Tout le monde souffre. Tout le monde, ou presque, meurt. Pendant ce temps, infatigable, le fils béni construit les mausolées magnifiques un peu partout. Il finit par enterrer son père dans un lieu sacré et protégé de tout, laissant là le vieux captif Katabolonga (sans doute l’unique personnage vraiment attachant de toute cette histoire) qui avait suivi Tsongor durant toute sa vie.
On est rassuré de savoir que Samilia, se rendant compte enfin, après tant d’années (mais ce n’est qu’une femme) qu’elle n’appartiendra à aucun des deux tueurs en chef, part tout droit devant elle à travers des déserts terribles, chevauchant un superbe cheval miraculeusement indemne des années de carnage. Ouf.
PS Rappelons à l’auteur (car c’est une faute qu’il commet à plusieurs reprises dans son texte) qu’on ne dit pas, et a fortiori, on n’écrit pas : « qui ne comprenait pas ce qu’il se passait… » mais : « ce qui se passait ». Voir les pages 45, 59, 201…
MORBRAZ
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